Yassine YAZE Mekhnache présentera sa première exposition personnelle LA CONFÉRENCE DES OISEAUX [ منطق الطير ] à la David Bloch Gallery à Marrakech du 27 Février au 24 Mars 2015.
Le vernissage aura lieu en présence de l’artiste Vendredi 27 Février à partir de 19H.
Cette première exposition personnelle au Maroc s’annonce comme un premier aboutissement de son œuvre – il partage depuis près de 10 ans des liens étroits avec le Maroc, notamment à travers sa collaboration avec des brodeuses marocaines.
En effet depuis 2007, YAZE exprime le lien entre tradition et modernité à travers son travail sur les toiles de coton tissées traditionnellement par les brodeuses de Tamesloht. Par ce mariage contrasté entre la finesse des broderies et l’énergie de son oeuvre, Yaze nous transporte dans un univers pictural vibrant.
Cette exposition est également une nouvelle étape dans le cheminement et la recherche de l’artiste – l’horizon s’étire vers l’Orient et plus particulièrement vers Pondichery en Inde.
Les impacts graphiques et dessins figuratifs fusionnent, les broderies traditionnelles marocaines se fondent dans la délicatesse des perles et soieries indienne donnant naissance aux oiseaux d’Attar, nous invitant à un voyage mystique dans l’imaginaire de l’artiste.
L’année 2015 s’annonce également très riche pour Yassine Mekhnache avec la sortie du documentaire de Rachid Djaïdani en Mars prochain qui lui est entièrement consacré.
———-
« Les broderies sont le fruit d’une collaboration avec les femmes du petit village de Tamesloht.
Elles sont unies avec lui, les paumes de leurs mains sont tatouées de henné filant sur les lignes de cœur, elles ont une grande fierté de pouvoir dévoiler leur créativité et atteindre sans blasphème à un peu d’immortalité.
Yaze me raconte que les femmes de Tameslohte, bien avant les Mille et une Nuits, partageaient entre elles des messages codés grâce au langage silencieux de leurs broderies.
Il y a comme un secret, un code pin qu’il ne décryptera jamais ce qui donne comme un sentiment d’envoûtement lorsque l’iris se fiche sur l’œuvre. »
Rachid Djaïdani
———-
« Il y a sept ans, Yassine Mekhnache croisait la voie ouverte au XIIème siècle par le poète Farid Attar, empruntée par des générations d’Hommes préoccupés d’accomplissement de soi ; une voie vers le divin intérieur, surpris dans le regard de l’autre ; une voie d’altruisme et d’amour, dont l’omniscience échappe au filtre de la raison pure ; une voie de renoncement aux vanités terrestres qu’ont périlleusement parcouru les trente oiseaux d’Attar pour rejoindre leur roi Simorgh.
Véritable fresque en devenir, la recherche picturale de Yassine Mekhnache autour du Langage des oiseaux d’Attar, récit emblématique de la pensée Soufi, s’il en est une variation, ne s’y résume ni ne s’y substitue pour autant : bien au contraire, le geste du peintre prolonge l’écriture du poète en éprouvant, par des moyens qui lui sont propres, ce langage universel auquel les vers d’Attar initie ; car Le langage des oiseaux, c’est celui de l’âme qui, adossé à l’autre que soi, s’y additionne pour former la somme divine.
Ce lien d’amour entre les Hommes comme fil rouge vers l’unité divine, entre l’Un et le Multiple, se résume en deux syballes, Si, Morgh : prises littéralement, Si-Morgh signifient, en langue perse, trente oiseaux ; une subtilité linguistique, qui consiste à faite sauter le trait d’union, transforme les trente oiseaux en une créature fabuleuse, Simorgh, roi des oiseaux et allégorie de l’abstraction divine.
La vision du projet en cours se construit sur cette intuition d’unité matricielle tissée à partir d’humanité multiple : une composition de trente toiles monumentales, dont chacune exprime en puissance le discours de l’ensemble dont elles sont partie, concrétise sur le plan pictural cette métaphore de communion humaine.
Sur trente ans de poursuite effrénée vers un visage fantomatique et multiforme, autour duquel la démarche de l’artiste s’est construite, les sept dernières furent accompagnées de près par le récit d’Attar, si près que l’ascendance du poète sur le peintre donna la mesure du temps, des espaces et des moyens d’expressions à emprunter pour en redéfinir la portée : l’empreinte définitive des voyages en Orient, opérés à de telles fréquences qu’allers et retours se sont interférés au point de se confondre ; l’abandon des pinceaux au profit des encres, pour ouvrir puis fermer les interprétations brodées par autrui de ses propres matrices, dont fils et aiguilles percent puis cicatrisent nervures et zones d’ombres, de l’autre côté du monde.
Le continuum entre l’impact primitif, que l’artiste jette sur chaque toile comme se jette un sort, et la minutie des ligatures brodées que les brodeurs enlacent sur chaque toile comme un regard posé sur l’Inconnu en soi, polarise et renverse ainsi l’incessant jeu d’échelle entre Chaos et Cosmos, Vitesse et Ralenti, Abstraction et Figuration, Proche et Lointain, Soi et Autre.Ces degrés de temps, d’espaces et de cultures, accumulés sur chaque toile de l’ensemble, servent ainsi à mesurer leur spectre commun, ce visage, dont l’imminence de l’absence est désormais composée de la puissance anonyme et multiple d’une chaîne humaine, que chaque regard posé sur la toile transcende. »
Celia DECALONNE